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Consentement du conjoint et privilège du prêteur de deniers

Consentement du conjoint et privilège du prêteur de deniers

Publié le : 19/07/2021 19 juillet juil. 07 2021

Le privilège de prêteur de deniers (appelé prochainement à disparaitre au bénéfice de l’hypothèque légale spéciale du prêteur de deniers) constitue une sûreté immobilière qui octroie au créancier ayant accordé un crédit immobilier pour l’achat d’un logement déjà existant, le privilège d’être indemnisé en premier, en cas de procédure de mise en vente, si le prêt immobilier n’est pas remboursé. 
Ce privilège doit être formalisé par acte authentique sous le contrôle d’un notaire et inscrit au service de la publicité foncière dans un délai de deux mois suivant la vente.

La Cour de cassation, dans un arrêt du 5 mai 2021 revient tant sur la notion de privilège du prêteur de deniers, que sur le consentement des époux et la responsabilité du notaire.

Des faits de l’espèce, il ressort que l’épouse avait acqui un bien immobilier pour le compte de la communauté. Ce bien a été financé par un prêt de 600 000 euros et garanti à hauteur de 500 000 euros par un privilège de prêteur de deniers.
À la suite de cela, le prêt n’est pas remboursé et le créancier délivre un commandement de payer valant saisie immobilière. Ce dernier est annulé en application de l’article 1415 du Code civil qui empêche l’action du créancier en ces termes : « Chacun des époux ne peut engager que ses biens propres et ses revenus, par un cautionnement ou un emprunt, à moins que ceux-ci n'aient été contractés avec le consentement exprès de l'autre conjoint qui, dans ce cas, n'engage pas ses biens propres. »

Le prêteur de deniers assigne alors le notaire dans la perspective d’engager sa responsabilité et demander une indemnisation. La cour d’appel suit le raisonnement de première instance. Elle considère que le consentement de l’autre époux à l’établissement d’un contrat de prêt soumis au privilège du prêteur de deniers est nécessaire, et fait droit à la demande du créancier.

Le notaire forme un pourvoi en cassation au motif que : « Le créancier, titulaire d’un privilège de prêteur de deniers constitué de plein droit et par le seul effet de la loi sur le bien qu’il a financé, peut saisir le bien ainsi grevé même s’il est entré en communauté et si l’emprunt a été souscrit par un seul des époux sans le consentement de son conjoint. »

Lors de la signature d’un acte de prêt souscrit par un seul époux soumis au régime de la communauté légale, le consentement de son conjoint est-il obligatoire afin de mettre en œuvre le privilège du prêteur de deniers ? 

La Haute juridiction rejette le pourvoi et déclare que : « Si l’acte de prêt souscrit par un seul époux sous le régime de la communauté n’est pas inefficace, la mise en œuvre du privilège de prêteur de deniers est subordonnée au consentement de son conjoint à l’emprunt. »

Le consentement des deux époux est ici nécessaire afin de mettre en œuvre la sûreté. Le notaire, en mesure de savoir d’une part que les époux étaient sous le régime de la communauté et d’autre part, que la vente était conclue au bénéfice de cette même communauté, a manqué à son obligation d’assurer l’efficacité de l’acte. 
Au regard de ces éléments, bien que le privilège ait bien été formé, il est en revanche impossible d’admettre la mise en œuvre du privilège du prêteur de deniers sur un immeuble de communauté, sans exiger le consentement des deux époux dans le but de garantir le paiement de la créance.

Référence de l’arrêt : Cass civ 1ere, 5 mai 2021 n° 19-15.072
 

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